L'Éphé-Maire...

... et non l'Effet Maire...

Hier soir, comme prévu, s'est joué l'acte II de la fronde ourdie par la majorité du Conseil Municipal. Une foule inattendue se pressait, dès 20h, sur la Place de la Fontaine et devant la porte de la Salle du Conseil. L'odeur du sang qui allait couler, sans doute.

Et en effet, la curée a commencé, à l'heure prévue, face à un gibier visiblement atteint, mais pas à terre.

Comme lundi dernier, les conseillers sont restés debout, tandis que leur porte-parole débitait un petit discours bien ficelé, réclamant la démission du maire. Néanmoins, ils avaient décidé, cette fois, de siéger (pour ne pas porter préjudice à la commune et à ses habitants, selon leurs termes). Le tout en présence d'un médiateur (Le Président de l'Association des Anciens Maires de Loir-et-Cher, Jean-Claude Negrello), tandis qu'à l'extérieur patrouillait un déploiement de gendarmes assez impressionnant (trois véhicules !). Le maire a informé qu'il répondrait à la question en fin de séance... bien que le mystère, concernant sa décision finale, ne fût guère palpitant.

Et le Conseil commença, avec sa monotonie habituelle, face à des spectateurs stoïques et debout pour la plupart.

Monsieur le Maire nous a informés de la démission d'Arlette Clément, conseillère de l'opposition... qui a été remplacée par Nathalie Vezin, qui a démissionné aussitôt, remplacée par Dominique Jouvet, qui a démissionné aussitôt... de même que tous les conseillers réservistes de l'opposition, ainsi qu'ils l'ont fait savoir par une lettre informant la municipalité de leur démission collective. Monsieur le Maire en a d'ailleurs entériné une partie... mais pas toutes, à commencer par celle d'Eric Lauverjat... sans qu'on en sache la raison exacte puisqu'elles figurent parmi les autres. Ce qui n'est pas illégal en soi, mais résulte une fois de plus d'une manoeuvre obscure à des fins encore moins claires. L'opposition se retrouve donc désormais réduite à trois personnes, de sorte que le Conseil siège désormais à 22. Ce qui n'est pas un problème en soi mais risque rapidement d'en devenir un si d'autres démissions tombent sur le bureau du premier magistrat de la commune. Est aussi sur le feu la démission de Valérie Goulet, conseillère de la majorité, pas encore actée, qui sera remplacée par le dernier réserviste de la liste majoritaire, Jean-Philippe Affret...

Tout de suite, l'on a pu noter les hésitations et les approximations du Premier Élu qui, visiblement, connaissait à peine le contenu des délibérations à voter et n'avait sans doute pas jugé utile de les relire avant de tenir conseil. Quant à son adjointe à la voirie, il s'est rapidement avéré qu'elle était incapable de répondre aux questions très précises et très pointues posées par l'un des conseillers de l'opposition quant à une série de bâtiments proposés pour des rénovations. Pis encore, elle a été totalement impuissante à justifier le projet de l'augmentation d'un taux sur les zones commerciales et artisanales, sinon par l'argumentation que "la commune était légèrement en-dessous de la moyenne des autres". Proposition qui a signé le début du mouvement parmi les conseillers des deux listes, à savoir sept abstentions, y compris celle du maire lui-même ! Allez comprendre...

Rapidement, nous avons compris qu'une sédition se tramait en sourdine parmi la majorité, notamment lorsqu'à la fin de la lecture d'une délibération, un Emmanuel Loupie sur des charbons ardents a fait remarquer une faute d'orthographe concernant le patronyme de la Ministre du Logement et de l'Égalité des Territoires...

Le même nous a d'ailleurs offert quelques instants plus tard un show en bonne et due forme, chargeant le Maire d'une ironie mordante, à propos du syndicat mixte du Pays des Châteaux, regroupant 65 communes de la région Blois-Chambord-Cheverny-Chaumont. Sans entrer dans le détail des objectifs de ce syndicat (https://fr.wikipedia.org/wiki/Pays_des_ch%C3%A2teaux) il est juste bon de savoir que notre excellent maire touche une indemnité pour s'y présenter... mais y délègue soit certains de ses conseillers (en l'occurrence, hier, le susdit Emmanuel Loupie) ou s'y fait représenter... par d'autres maires de l'Agglo... en omettant d'en informer qui que ce soit. Transparence et démocratie sont les mots d'ordre de cette mandature... Un Loupie très en forme, en tout cas, qui fut vivement applaudi par le public présent !

Peu après, l'opposition passait à l'attaque, sur une partie du budget consacrée... à l'épargne retraite complémentaire (conséquente) à laquelle notre maire et son adjointe à la voirie ont décidé de souscrire... ou plutôt à laquelle ils ont décidé que la municipalité devait souscrire. En somme, notre Élu en chef, si transparent, si limpide, si rigoureux et si frileux quand il s'agit des finances, n'hésite cependant pas à mettre à contribution les caisses communales... pour son propre compte. Précisons tout de suite que la démarche est parfaitement légale... mais en total désaccord avec la ligne de conduite fixée par cette mandature, à savoir : gérer le budget au plus près et ne pas dépenser l'argent que nous n'avons pas. On comprend à présent pourquoi il tenait à cette rigueur... On n'est jamais mieux servi que par soi-même...

Le tollé de l'opposition a été suivi par plusieurs conseillers de la majorité, en tête desquels Emmanuel Loupie, décidément en forme, qui n'a pas manqué d'en rajouter une couche. Monsieur le Maire a bien tenté d'argumenter, en prétendant que la précédente mandature avait fait de même, ce qui est totalement FAUX (la chose ayant dûment été vérifiée par l'opposition avant le Conseil), puis arguant qu'étant en disponibilité totale, il ne cotisait plus, durant ce temps, aux régimes de la SNCF... ce qui n'est pas un argument vu qu'il a fait ce choix en pleine connaissance de cause, et que depuis le 1er janvier 2013 les indemnités d'élus touchant plus de 1543€ brut/mois sont assujettis aux cotisations obligatoires de retraite notamment (Loi 2012-1404 du 17 décembre 2012). 

Au total, sept votes contre et six abstentions... proposition entière rejetée !... et ce malgré une tentative de manipulation des chiffres qui, heureusement, n'est pas passée inaperçue aux yeux des conseillers.

Pour finir, Jean-Christophe Desprès, conseiller de l'opposition, n'a pas manqué de rappeler à notre vertueux maire certains textes de législation en vigueur, concernant notamment les démissions au Conseil. Chose qui n'a pas semblé émouvoir plus que nécessaire le principal concerné.

Enfin, le moment que nous attendions tous est arrivé : LA RÉPONSE. Laquelle s'est soldée par un joli petit discours bien ficelé annonçant qu'il ne démissionnerait pas (ça, on l'avait deviné depuis longtemps), qu'il avait peut-être fait quelques erreurs (quelques ? non ? c'est pas possible !), que c'était son premier poste d'élu et qu'il méritait bien un peu d'indulgence (vous savez, ce pauvre petit agneau qui annonçait il y a quelques mois par voie de presse "qu'il était fait pour ça" !), et qu'il remerciait Truc, Machin, Bidule et sa femme (ah bon ? pourquoi ?) de l'avoir soutenu, etc. etc. etc. Ce qui lui valut aussitôt de nombreux sifflets de l'assistance présente et des coups d'oeil atterrés d'une large partie de la majorité.

Un Conseil mouvementé, en somme, mais assez consternant, bien loin de toute la solennité qu'on pourrait en attendre. Mais est-ce étonnant !

Reste à savoir ce que la majorité va décider après cette séance : s'aplatir et continuer, comme si de rien n'était, pendant quatre ans et demi, en plein absolutisme non éclairé... ou prendre son courage à deux mains et rendre son tablier, limogeant du même coup la tête de la pyramide? Soumission ou démission ? Résignation ou insurrection ? Humiliation ou nouvelles élections ?

L'acte III est en marche !